lu pour vous sur Libération "Cahuzac : l’exécutif sonné par le compte"


Libération le 2 avril 2013
Jérôme Cahuzac à son arrivée au Pôle financier mardi.
Jérôme Cahuzac à son arrivée au Pôle financier mardi. (Photo AFP)
    Après quatre mois de dénégations, l’ex-ministre du Budget a avoué et a été mis en examen. Le pouvoir est fragilisé alors que la droite évoque déjà une «affaire d’Etat».

«Pris dans une spirale de mensonges», selon ses mots, Jérôme Cahuzac, l’ex-ministre du Budget, a décidé de ne plus se «fourvoyer» et a tout avoué hier aux juges d’instruction Roger Le Loire et Renaud Van Ruymbeke. Cet ancien chirurgien de 60 ans, qui fit fortune dans les implants capillaires, est ressorti du bureau des magistrats du pôle financier mis en examen pour «blanchiment de fraude fiscale». Selon son nouvel avocat, Jean Veil, qui l’a incité à changer de stratégie - sa position étant devenue intenable -, Jérôme Cahuzac a en effet reconnu qu’il possédait bien à l’étranger un compte bancaire qui «n’a pas été abondé depuis 2001». Cahuzac ayant été conseiller du ministre socialiste de la Santé, Claude Evin, de 1988 à 1991, son défenseur circonscrit par avance certaines hypothèses sur la provenance de ces fonds : «L’essentiel de ses revenus provenait de son activité de chirurgien et accessoirement de son activité de consultant», explique Me Veil. De plus, un témoin ayant déclaré sur procès-verbal que les sommes versées en Suisse proviendraient «d’avantages» perçus en tant que médecin de la part de laboratoires pharmaceutiques, Jérôme Cahuzac a également été mis en examen pour «blanchiment de fonds provenant de la perception par un membre d’une profession médicale d’ avantages procurés par une entreprise dont les services ou les produits sont pris en charge par la Sécurité sociale».
«Remords». A la sortie, Jérôme Cahuzac a posté sur son blog un mea culpa préparé à l’avance (lire ci-dessous et page 4) . Il explique avoir envoyé, le 26 mars, une lettre aux juges d’instruction, pour être reçu«afin que, délivré des obligations de ma fonction, [je] puisse enfin donner les explications qui s’imposent au regard de la détention à l’étranger d’un compte bancaire dont [je] suis le bénéficiaire depuis une vingtaine d’années». Il indique le montant «des actifs déposés sur ce compte, environ 600 000 euros» et avoir donné des instructions pour les rapatrier à Paris. Après avoir menti à tout le monde, Cahuzac«demande pardon» au chef de l’Etat et au gouvernement, «exprime[ses] profonds regrets» aux parlementaires, à ses électeurs et«collaborateurs», à ses proches qu’il a «tant déçus». Il s’affiche en proie à un «conflit» intérieur entre son «devoir de vérité» et ses «missions» à remplir pour justifier qu’il les a tous trompés voire trahis : «Je suis dévasté par le remords», écrit Cahuzac qui s’en veut d’avoir commis«une faute inqualifiable».
Pour le Canard enchaîné qui était dans la confidence de sa volonté de«passer aux aveux», il semble que Cahuzac «se soit senti cerné par l’enquête en cours au point de prendre les devants»Les découvertes du substitut du procureur général de Genève, Yves Bertossa, n’allaient pas manquer de lui sauter à la figure. Paris Match révélait en effet jeudi dernier l’existence d’un compte de Jérôme Cahuzac à l’Union des banques suisses (UBS), fermé fin 2000, puis l’ouverture d’un autre compte dans la même rue du Rhône à Genève, à la banque Reyl et Cie, qui a ouvert une succursale à Singapour en 2010. Un magistrat parisien déplore que l’ex-ministre du Budget ait mis autant de temps à admettre les faits : «C’est triste qu’il ait menti comme un délinquant de droit commun. On lui en a pourtant tendu des perches…»
Mediapart avait ouvert le feu le 4 décembre avec une enquête sur son compte «non déclaré» à l’UBS sur la foi d’un enregistrement réalisé en 2000 à Villeneuve-sur-Lot qui trahit ces paroles imputées à Cahuzac :«Ça me fait chier d’avoir un compte ouvert là-bas, l’UBS c’est quand même pas forcément la plus planquée des banques.» Mais le lendemain, l’élu du Lot-et-Garonne conteste que la voix soit la sienne et prononce un démenti solennel devant l’Assemblée :«Je n’ai pas, je n’ai jamais eu de compte à l’étranger. Ni maintenant, ni avant.»
«Locuteur». Enferré dans le déni, le ministre du Budget, censé traquer la fraude fiscale, n’hésite pas à attaquer Mediapart en diffamation puis à saluer, le 8 janvier, l’enquête déclenchée par le parquet de Paris qui permettra «de démontrer sa complète innocence». Mais loin de le blanchir, l’enquête démontre que l’analyse vocale de la bande-son«renforce l’hypothèse que Jérôme Cahuzac est le locuteur inconnu». Surtout, les premières investigations ont permis au parquet «d’établir la matérialité d’un compte à Genève supposément transféré à Singapour». Du coup, le procureur a ouvert, le 19 mars, une information judiciaire pour diligenter des investigations «en Suisse mais aussi à Singapour», ce qui a provoqué la décision immédiate de François Hollande de mettre «fin aux fonctions de Jérôme Cahuzac».
Nota du Bloggeur : Donc, dans l'esprit "tourmenté" du Sieur, faire revenir l'argent des revenus de ses "2 cliniques et de son laboratoire" en France, c'est retirer les valeurs de l'UBS pour les déposer dans la banque suisse de la rue d'en face. Chez moi, ça sonne faux. Et pour vous ?


Le site d’info Médiapart a révélé l’affaire et a tenu bon face aux critiques.

Jean-Michel Aphatie s’est contenté d’un tweet pudique : «Grosse activité sur mon compte twitter cet après-midi. Merci à tous. Pour de nouvelles aventures, rendez-vous demain sur le blog.» Le détracteur en chef de Mediapart, journaliste à RTL et au Grand Journal de Canal+, est étonnamment peu disert sur l’enquête du site internet fondé par Edwy Plenel, après l’aveu de Jérôme Cahuzac hier après-midi.....

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire