L'europhobie a le vent en poupe dans les pays de l'Union

Marine Le Pen et le leader nationaliste néerlandais du PVV, Geert Wilders (au centre), lors d'une visite de la chef de file du FN à La Haye, en novembre dernier.









Marine Le Pen et Geert Wilders, leader Nationaliste Néerlandais du PVV -  Nov.2013 - La Haye / Article de Jean-Jacques Mevel du Figaro du 14 février 2014

En mai, un siège sur cinq du parlement de Strasbourg pourrait revenir aux partis antieuropéens, tels le Front national en France ou l'Ukip au Royaume-Uni.
Les sondeurs et les politologues sont à peu près d'accord: au soir du dimanche 25 mai, lorsque le dernier bureau de vote italien aura fermé l'isoloir, un sur cinq des 751 sièges du parlement de Strasbourg pourrait revenir aux partis antieuropéens, tel le Front national en France, l'Ukip au Royaume-Uni ou le Parti pour la liberté (PVV) aux Pays-bas.
À l'extrême droite, le capital électoral est vite dilapidé et, si ces partis se préparent à gagner beaucoup d'une élection sur l'autre, d'autres pourraient chuter lourdement, comme les nationalistes flamands du Vlaams Belang, ou encore les ultranationalistes hongrois de Jobbik. Mais ceux des 340 millions d'électeurs qui ne bouderont pas le scrutin risquent de se défouler après six ans de crise économique. L'issue ne fait guère de doute: à la droite de la droite surtout, mais aussi à la gauche de la gauche, l'europhobie a le vent en poupe.
Est-ce une lame de fond? Pas tout à fait. L'agrégation des sondages nationaux laisse prévoir que les partis à la droite du PPE (l'UMP en France) pourraient ravir quelque 150 sièges au Parlement européen, contre un peu plus de 110 depuis 2009. Un élément déstabilisant est l'érosion annoncée des partis charnières, comme le centre libéral (Alde) et les Verts. Dans la future assemblée, les clivages s'annoncent plus marqués et le consensus plus difficile à nouer.

«Scénario de confrontation»

Plutôt que de converger sur l'essentiel, comme jusqu'à présent, les conservateurs du PPE et la gauche sociale-démocrate du S&D (le PS en France) pourraient théoriquement chercher l'appoint majoritaire en regardant chacun de son côté. L'alliance à gauche, avec la Gauche unitaire (Jean-Luc Mélenchon en France) et jusqu'au parti grec antieuropéen Syriza, est un «scénario de confrontation» envisagé par Martin Schulz, patron allemand des socialistes européens et candidat à la présidence de la Commission.
À droite, il est difficile d'imaginer un effet de miroir. D'abord parce que les deux mastodontes que sont la CDU-CSU allemande et l'UMP française n'affichent aucune sympathie pour l'extrême droite, ou même l'euroscepticisme. La droite européenne s'est précisément brisée sur cet écueil en 2009, lorsque les conservateurs britanniques ont quitté un PPE jugé «trop fédéraliste», pour fonder un autre groupe à Strasbourg, en compagnie de leurs cousins polonais et tchèques. Cette plaie, illustrée par les visions européennes divergentes d'Angela Merkel et de David Cameron, est loin d'être pansée.
Avec les extrêmes, Marine Le Pen, Nigel Farage ou Geert Wilders, les relations de la droite traditionnelle sont encore plus tendues. Les «antieuropéens» vont gagner une solide tribune à Strasbourg cet été. Le Front national ne compte aujourd'hui que trois élus dans l'hémicycle, la présidente, son père et le stratège Bruno Gollnisch. La délégation se retrouvera sans doute multipliée. Mais au-delà des coups de menton et des éclats destinés aux caméras, pourront-ils peser sur le travail politique et législatif de l'institution? Rien n'est moins sûr.

La difficile union de l'extrême-droite

L'étape décisive serait la constitution d'un groupe parlementaire, qui selon les textes doit réunir 25 eurodéputés élus dans sept pays différents. Marine Le Pen s'est attelée à la tâche et ne paraît plus si loin du but. Le Néerlandais Geert Wilders est son allié numéro un. Elle a aussi trouvé des appuis au FPÖ autrichien, à la Ligue du Nord italienne et au Parti national slovaque. Mais sa quête d'unité a aussi démontré la fragmentation d'un spectre qui va des souverainistes jusqu'aux europhobes.
Nigel Farage, patron de l'Ukip et rival crédible de David Cameron, refuse de se joindre à un mouvement qu'il juge extrémiste. Tout comme le nationaliste Bart de Wever, chef de la NVA et champion des sondages en Belgique. Lui réussit même l'exploit de mobiliser ses troupes sous les deux drapeaux, celui de l'Europe et celui de la Flandre.

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