Le culte de l'ignorance

Il est rare au XXIème siècle qu'une administration scientifique puisse encore utiliser l'index inquisiteur pour décider de l'existence ou de l'interdiction d'une science, qu'elle soit fondamentale ou appliquée.
Il est rare, en Occident, en 2014, qu'une bureaucratie puisse décider de supprimer la réalité quand elle ne convient pas.
Rare mais pas impossible.
La question de l'enseignement de la criminologie fait l'objet en France d'un curieux débat ou se mélangent les haines individuelles, les relents familiaux, et l'apologie de l'ignorance.
Depuis la courageuse décision de proposer la création d'une chaire spécialisée au Conservatoire National des Arts et Métiers (dont on rappellera qu'il a été inventé avec l'école Polytechnique, par la révolution française pour enseigner tout ce dont l'université ne voulait pas : les sciences et techniques, l'économie et la gestion avec Jean Baptiste Say,... Et depuis 2009 la criminologie.
Si elle est enseignée, sous des formes très différentes dans le monde entier, espace assez large ou on considère que l'existence d'un ou des criminels, une ou des victimes, des circonstances et des modes opératoires, nécessitent une connaissance précise d'un phénomène appelé crime, elle fait l'objet d'un rejet constant d'une rare alliance théologique entre pénalistes et sociologues. Chacun exprimant à la fois son refus de l'existence de cet science, puis, faute d'arguments, qu'ils occupent déjà le terrain (par crainte de perte de postes d'autant plus rares qu'ils ne font pas souvent l'objet d'une gestion remarquable).
Après des discussions longues, des oppositions frénétiques et des publications de libelles prenant des libertés assez grandes avec la réalité, il existe toujours une chaire de criminologie accueillant des étudiants sans grande publicité, ni moyens particuliers, ni diplôme spécifique. Les emplois créés pour accueillir les collègues "clandestins" ont été bloqués ou détournés, la section de recrutement permettant de gérer les candidatures et les carrières supprimée, la formation promise en master récemment "oubliée".
Seule la défunte Union Soviétique avait pu déterminer, longtemps après l'inquisition, une politique des interdits scientifiques. Il lui subsiste visiblement une fille ainée, encore suffisamment fière de ses actes pour s'en vanter.
Il est rare qu'un pays puisse accepter qu'on refuse la prise en compte de la violence, du crime, de la souffrance des victimes.
Il est rare qu'un pays puisse décider doctement de nier la réalité.
Rare mais pas impossible. C'est en France. En 2014.

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